J'ai eu la chance de participer à la conférence de Samuel Mamias à Epinal 2025. Sa conférence portait sur l'utilisation de SketchUp pour s'affranchir du long et fastidieux dessin à la main d'une épure. Pour illustrer son propos, il était venu avec un piètement Buenos Aires.
Le sujet était d’intérêt pour moi car il y a peu, je m'étais intéressé à l'art du trait et j'ai réalisé une épure pour un tréteau cadet : voir pas à pas ci-dessous.
De retour à mon atelier, en lorgnant sur une pile de planches de sapin de récupération, je me suis dit pourquoi pas !
Ce pas à pas va donc retracer les différentes étapes de la réalisation de ce bout de canapé à piètement Buenos Aires.
Liste des articles
Définition
Je viens de me demander pourquoi cela s'appelle 'Buenos Aires'. Internet me donne l'explication suivante (contenu rédigé par IA) :
Origine de l'appellation « tréteaux de Buenos Aires »
L'expression « tréteaux de Buenos Aires » désigne une technique spécifique de charpente ou de menuiserie, utilisée pour assembler des tréteaux (ou chevalets) de manière pyramidale et déversée, souvent avec plusieurs pieds (3, 4 ou plus). Ces structures sont typiques du tracé d'arêtier (géométrie descriptive appliquée au bois), où les entailles des pièces s'alignent précisément pour former une base stable, comme une pyramide polygonale.
D'où vient ce nom ?
L'origine exacte de l'appellation reste un peu obscure dans les sources spécialisées, mais elle semble liée à l'histoire de l'architecture et de la charpente en Amérique du Sud, particulièrement en Argentine. Buenos Aires, en tant que grand port d'immigration européenne (notamment française et italienne) au XIXe siècle, a été un carrefour d'échanges techniques en construction navale et bâtiment.
Hypothèse principale : Le nom proviendrait de l'utilisation de ces tréteaux dans les ateliers de menuiserie ou de charpente navale des chantiers portuaires de Buenos Aires. Les immigrants français, experts en trait de charpente, auraient exporté ou adapté cette méthode polygonale (inspirée des techniques européennes comme le « rembarrement » ou la « sauterelle ») aux besoins locaux, où les matériaux comme le bois dur d'Amérique du Sud (ex. : quebracho) permettaient des assemblages complexes. Des forums et tutoriels de charpentiers français (comme sur L'Air du Bois ou Forum-Charpente) mentionnent que cette technique est enseignée dans les écoles de charpente hexagonales depuis les années 1960, avec une référence récurrente à Buenos Aires comme berceau, sans doute via des échanges transatlantiques.
Si vous cherchez un tutoriel détaillé, des ressources comme le pas-à-pas de Sylvain Le Francomtois sur L'Air du Bois expliquent le tracé étape par étape. Avez-vous un projet spécifique en tête ?
NDLR : on appréciera la référence aux articles de Sylvain le Francomtois.
SketchUp : modélisation
Je ne vais pas rentrer dans le détail de la modélisation sous SketchUp, il y a plein de tutos de par le web.
Néanmoins, l’intérêt de la modélisation 3D permet de tester plusieurs combinaisons pour le meuble, par exemple, 3, 4, 5 pieds. Croisement à mi-longueur ou pas (c'est le cas de mon piètement).
Samuel Mamias, dans sa conférence indique également qu'il a choisi un décalage latéral et une inclinaison des pieds pour laisser un espace au milieu de l'assemblage (voir photo avec les 5 pieds) [PHOTO 1].
De plus, lors de la conférence, Samuel Mamias a démontré directement sur écran et j'ai découvert des raccourcis que je ne connaissais pas, qui permettent d'essayer très rapidement différentes variantes. Je vous en fait profiter : vous dessinez 1 pied. Et en quelques clics de souris, il est possible de dessiner automatiquement les autres (3 ou plus en fonction du nombre de pieds désirés) avec le bon angle de rotation. Après quelques recherche, voici la séquence à effectuer :
- dessiner 1 pied (le transformer en 'composant' pour éviter qu'il fusionne avec les autres lors des tests)
- le sélectionner [PHOTO 2]
- choisir l'outil rotation et appuyer sur CTRL pour avoir la copie automatique
- cliquer une première fois sur le point que sert d'axe de rotation
- cliquer une seconde fois pour définir l'axe de référence de la rotation
- saisir 270 (c'est l'angle si on veut 4 pieds)
- valider (appuyer sur ENTREE) et le 2eme pied se positionne automatiquement [PHOTO 3]
- saisir /3 et la magie fait que les 270 degrés sont divisés en 3 (donc 90 degrés) et que 2 pieds sont ajoutés automatiquement... [PHOTO 4]
Vous pouvez alors décider si cela vous convient [PHOTO 5] ou faire CTRL-Z (annuler) et recommencer avec un décalage / angle différent ...
Sketchup : usinages à faire
Cette partie est assez simple. Il suffit d'utiliser la fonction 'intersection de faces'.
Ensuite, isoler un pied à côté du dessin du meuble, supprimer les faces superflues et tracer les arêtes manquantes.
Sketchup : mise en 2D pour impression
La dernière étape consiste à déplier le pied sur un plan pour avoir les 4 faces à plat. C'est la partie la plus compliqué de l'épure à la main : la projection en grandeur réelle de la pièce, et c'est la que l'on gagne énormément de temps avec Sketchup.
Il est ensuite assez simple, en prenant une 'vue de dessus' en 'projection parallèle' d'avoir ce qu'il faut pour faire une impression papier à l'échelle 1.
Sapin de récupération
Comme il s'agit d'un prototype (premier essai et pas sur du rendu final en terme de proportions), je voulais utiliser du bois de récupération.
Il se trouve que j'avais en stock des pieds de table Ikea et des lattes de sommier d'un lit. Tout cela en sapin. Mieux que du bois de palette, mais pas du bois d'exception non plus.
Une séance de mise à longueur globale était nécessaire avant de passer au rabotage.
Je voulais raboter les pieds pour avoir des sections carrés (plus facile pour l'usinage des encoches), et aussi pour passer de 48 à 34 mm. C'était l'occasion d'essayer ma nouvelle raboteuse toute neuve.
Des marques sur le bout des pieds m'ont permis de raboter les 4 faces en plusieurs passes jusqu'à arriver aux 34mm souhaités.
Préparation du plateau
Le plateau est fait avec les lattes de sommier. De 15mm d'épais, il fallait faire une légère passe de rabot avant de les coller 2 à 2 pour atteindre une épaisseur de 28mm.
Les chants sont ensuite rabotés pour faire le collage chant sur chant pour atteindre une planche de 35cm de large.
J'ai fait un plateau en forme d'ellipse.
Donc, dessin avec 2 clous, une ficelle et un crayon !
Découpe à la scie sauteuse et mise en forme finale avec la ponceuse à bande fixée en horizontal avec un serre joint. C'est très efficace !
Le chanfrein sous le plateau est réalisé à l'affleureuse avec une fraise à 45° en 3 passes (faisable en 2, mais ça force un peu avec le modèle 12V de Bosch).
Rembarrage des pieds
Cette partie est assez simple mais nécessite de la précision.
Le plus simple est de reporter directement depuis le papier sur le bois. Il est possible de découper les encoches dans le papier et de 'décalquer' directement sur la pièce de bois...
Note : les experts noterons que j'ai fais le rembarrage des 2 encoches sur chaque pied. Il s'avère qu'il y a 2 options :
- 1 encoche par pied
ou - 2 encoches sur 2 pieds (et rien sur les 2 autres) - ca ne marche qu'avec un nombre pair de pieds
Je ne le savais pas, mais je me suis arrêté à temps en faisant l'usinage.
Usinage des pieds
Ici, le plus simple est d'utiliser un ciseau à bois bien affuté et d'y aller progressivement.
Assemblage final
La difficulté de cette étape, c'est de tenir les pieds pendant le collage.
Un plateau avec des cales permet de faciliter grandement le collage.
L’avantage d'avoir 4 pieds, c'est que les faces extérieures sont parallèles deux à deux, donc on peut utiliser des serre-joints. J'ai collé à l'époxy car mon usinage n'était pas parfait.
Les pieds sont fixés avec des tourillons sur le plateau.
Le résultat est très solide, je peux m'assoir dessus. Néanmoins, je ne recommanderais pas de l'utiliser comme tabouret sans avoir mis des vis dans l'assemblage des pieds (il est possible de mettre 3 vis pour tenir les 3 premiers pieds et de coller le dernier, ainsi aucune vis n'est apparente).
Bilan
Très content de cet exercice qui s'avère être plus simple que ce que je ne pensais, notamment avec la méthode de dessin par Sketchup pour simplifier le travail d'épure.
Je pense qu'un plateau oval n'est pas le meilleur choix et qu'il faut un plateau rond pour que l'harmonie soit maximale sous tous les angles de vue.
Licence
Discussions
AH! C'est cette étape que j'attendais : le 2D. Je pense que je vais enfin comprendre comment le volume se déplie. Merci
Ce n'est pas un tuto sketchup, donc pas sur que tu ais toutes les infos que tu souhaites. Mais n’hésites pas si tu as des questions. En gros, il faut dissocier chaque face et la tourner de 90, 180 ou 270 deg pour la poser au sol.
Kilago Merci, c'est justement parce qu'il y a une vue 2D, donc "indépendante" de sketchup que je suis ravie ;) Je vais pouvoir reproduire avec un crayon sur du papier. Je n'ai pas Sketchup et ne désire pas l'avoir non plus et aussi j'ai beaucoup de difficultés a comprendre les épures telles que présentées par notre regretté Sylvain. Donc je pense bien que je vais tester. Merci encore
Je n'ai pas bien compris, le piètement Buenos Aires, il ne faut qu'une seule entaille sur chaque pied et non deux comme le montre la perspective "Usinage à faire". La deuxième partie c'est le montant proche qui n'est pas entaillé, non ?
Bien vu, j'ai découvert cela en le faisant et je vais l'expliquer dans le pas à pas.
Tu peux faire 2 encoches sur 2 pieds et rien sur les 2 autres, ou alors 1 encoche sur chaque pied. Avec un nombre impair de pied, il faut une seule encoche par pied !
Merci Kilago, maintenant j'ai compris. Bonne continuation.