Dis comme ça, ça ressemble à un verbe irrégulier en anglais... Bref.
Cette fois je délaisse le placage et autres kumiko pour faire du solide, du massif, du tradi.
Rien de bien innovant dans la conception, mais de la menuiserie classique agréable à faire. Et, à priori, à recevoir
.
Je ne détaille ici que la fabrication de la table, pour le tabouret c'est la même... en plus petit.
Bref, je commence par le marquage et le débit du bois. L'originalité, c'est que le client a fourni le chêne. D'ordinaire je me méfie quand le client veut ça, parce que je n'ai pas choisi les plateaux moi-même et que dans ces cas-là, c'est comme une boîte de chocolat : on ne sait jamais sur quoi on va tomber.
Eh bien cette fois-ci, il s'avère que je suis tombé sur du chêne bien sec (25 ans au moins) et assez sympa en terme de veinage... au prix d'une perte de 30 à 40% au moins de matière ! Il y avait de tout : des nœuds, des fentes, de la roulure, de l'aubier, des trous de vers... Mais comme la quantité était large, pas de soucis. Disons que j'ai fait au mieux. Une fois débité et corroyé, on y voit plus clair, et on aura de quoi se chauffer quelques soirs au coin du feu.
Ensuite, collage des plateaux à plat joint, pour le dessus de la table et les tablettes. Puis surfaçage au rabot, racloir, et ponçage grossier au tank.
J'étais super juste en épaisseur (les planches étaient super gauches), donc j'ai quelques défauts de surface sur le dessous du plateau de la table. Heureusement, les clients n'ont plus l'âge de se mettre à 4 pattes sous la table
.
Pour les pieds, j'avais proposé un gainage léger pour affiner la silhouette de l'ensemble, ainsi qu'une mini-élégie.
Le gainage est fait à la scie sous table avec un guide et une cale. C'est rock'n'roll et assez imprécis, mais je n'avais pas mieux (par exemple, ma raboteuse est trop courte pour un montage d'usinage à cette fin). Mais en finissant ça au rabot à main, le résultat est correct.
L'élégie (discrète) est simplement faite à la scie japonaise et au ciseau de 4mm. (c'est ce qu'on voit sur la photo ci-dessous, au moment du chevillage).
Concernant les traverses, elles sont légèrement courbées (scie à ruban puis racloir). Les traverses de côté sont aussi entaillées pour laisser passer les tablettes (une de chaque côté) qui se rangeront sous la table.
Les assemblages pieds / traverses sont de simples tenon-mortaises, collés à la colle forte puis chevillés. J'aurais peut-être pu (j'aurais dû) cheviller à la tire, mais dans l'empressement du collage, j'ai tout simplement oublié de préparer ça
.
Les assemblages sont réalisés en partie à la machine, en partie à la main : par exemple les mortaises sont "entamées" à la mortaiseuse à bédane carré, puis fini d'équarrir à la main (la mortaiseuse n'étant pas assez précise à mon goût).
Les tenons sont à épaulement sur le bas et la face visible.
Les chevilles sont faites à la perceuse dans des chutes, avec un... machin à faire les chevilles, acheté chez l'asiatique du coin. Ça fonctionne, mais avec une sous-cote d'environ 3 à 5 dixièmes de diamètre. Pour les chevilles du tabouret, je suis donc parti sur une perçage à 7 mm au lieu de 8mm, et des chevilles de 8 (donc 7,5), poncées avant insertion pour descendre au bon diamètre. Une perte de temps certes, mais somme toute raisonnable.
Ensuite, c'est le collage : plus sereinement cette fois, aucun soucis particulier. On vérifie bien les équerrages, une fois, deux fois, dix fois si besoin, et tout roule.
Petit aparté pour le support des tablettes sous la table, au cas où ça en intéresserait certains.
Je ne voulais aucune quincaillerie (à part qques vis). J'ai donc choisi de faire reposer les tablettes sur des coulisses elles-même en appuis sur les traverses de côté.
Les deux coulisses sont reliées en leur centre par une traverse, qui sert à la fois de renfort et de fixation : elle est pourvu de petits aimants qui retiendront - un peu - les tablettes quand elles sont repliées.
Car sous les tablettes, il y a des butées qui font office d'arrêt lors de l'ouverture contre les traverses de côté, et d'ancrage aimanté en position fermée.
Le plateau du dessus est fixé par des tasseaux vissés, pour être démontable aisément. Cela permet aussi sa finition "à part".
Les poignées des tablettes sont des encoches "invisibles" faites à la défonceuse sous ces dernières, complétées par un chanfrein dans les traverses de côté.
Finition à l'huile-cire Blanchon, deux couches au pinceau puis essuyage au chiffon coton. Séchage long (très long même, il faisait trop frais dans la pièce de finition) mais le rendu est chaleureux et assez qualitatif je trouve.
Je vous glisse aussi quelques photos du tabouret assorti, même si c'est finalement le même boulot.
Le trou du dessus est une poignée voulue par les clients.
Et si vous avez des questions, n'hésitez pas ! Bonne journée !

Discussions
Bonjour,
Merci pour tous les détails!
J'ai justement essayé hier de créer mes propres chevilles avec une technique vue en vidéo (en lien dans un ancien post) mais je n'y suis clairement pas arrivée.
Ton outil, c'est celui qu'on voit "partout sur tous les sites en ligne"? Ça marche vraiment? Tu as taillé un carré de 8mm de côté pour le passer dans la bague de 8mm? As tu dégrossi au rabot ou autres les angles du carré avant de le passer dans la chinoiserie?
Oui cnest cet outil-là. J'avais des chutes de 10mm de côté. J'ai taillé les bouts au couteau (il fallait aussi réduire côté perceuse pour le prendre dans le mandrin), puis serré un bout dans le mandrin. L'autre bout dans l'outil et c'est parti, en essayant de rester bien dans l'axe et de ne pas trop pousser. Le résultat n'est pas parfait (je pense que c'est d'ailleurs dû aux décalages par rapport à l'axe) mais c'est suffisant. Reste à gérer la sous-cote comme expliqué précédemment.
La prochaine fois je mettrai en effet au rond avant l'usinage, avec un rabot et un gabarit, ça facilitera le travail. Et je calerai la perceuse pour avancer bien droit.
Et bien c'est très joli comme résultat.